LE CONSEIL DE CLASSE :
QUELLE UTILITE AUJOURD’HUI ?
Le conseil de classe fait partie des obligations de service des professeurs, à raison d’un conseil de classe par classe et par trimestre. Mais son déroulement amène parfois à se questionner sur sa réelle utilité.
On assiste en effet à une baisse progressive du temps d’expression des professeurs. Le traditionnel tour de table qui suit le bilan du professeur principal est de plus en plus remplacé par une simple question du chef d’établissement : « est-ce que quelqu’un veut ajouter autre chose ? ». Ensuite, l’étude de la situation individuelle de chaque élève a tendance à ressembler à une chambre d’enregistrement des décisions prises en amont par le chef d’établissement, lors du rendez-vous préparatoire du conseil de classe. S’il est vrai que c’est lui qui a légalement le dernier mot, cela ne devrait pas l’exonérer de consulter l’équipe pédagogique et de s’aligner sur ses demandes en cas de désaccord.
L’an dernier nous a par ailleurs montré qu’on peut même se passer totalement de consulter les professeurs étant donné que de nombreux conseils de classe de 3e trimestre n’ont pas eu lieu. Certes la fin d’année a été chaotique, entre confinement total et déconfinement partiel et volontaire, sans notes même. Mais il n’a pas été jugé utile d’entendre ce que les professeurs auraient eu à dire à propos de cette période de travail si particulière.
La façon de faire de certains chefs d’établissement peut aussi transformer le conseil de classe en une gigantesque foire aux mentions. Leur distribution avec une exceptionnelle générosité est source de statistiques élogieuses pour l’établissement – donc tremplin intéressant pour une carrière. Par conséquent, il ne se passe plus de conseil de classe sans voir une bonne partie des élèves recevant encouragements, compliments ou félicitations – et tant pis si cette libéralité en dénature le sens. A noter que cela se base généralement sur les moyennes sèches des élèves. Les appréciations négatives écrites figurant dans le bulletin scolaire ne pourraient y mettre un frein et un enseignant qui s’y opposerait serait difficilement audible.
Par ailleurs, l’examen des compétences validées, ou pas, par les élèves peut donner lieu à des scènes en conseils de classe dignes des meilleures dystopies. Il est en effet fréquent que le chef d’établissement choisisse sans explications de valider des compétences pourtant jugées non acquises par les professeurs.
Autrefois un moment très attendu des collègues pour exprimer leur parole légitime, le conseil de classe a progressivement vu les temps d’échange se réduire, jusqu’à parfois disparaître. Ce que les professeurs ont à dire sur leurs élèves, autrement dit leur expertise, n’intéresse plus la hiérarchie. Il ne faudrait pas qu’ils viennent empêcher la dispendieuse attribution des mentions et mettent en péril l’objectif des 100% de réussite aux examens nationaux …
Dès lors, les collègues peuvent se demander à raison quel est le sens de leur présence dans cette instance où ils sont passifs, comme relégués au second plan. Cela va à l’encontre de la définition du mot « conseil » : une réunion de personnes qui délibèrent…
Quel est même l’intérêt de formuler un bilan pédagogique écrit pour chaque élève puisqu’il y a des risques qu’on n’en tienne pas compte ? Ce sont les enseignants qui, tels des poilus de la Grande Guerre, sont au front tous les jours face aux élèves, et qui connaissent mieux que quiconque leurs qualités, leurs difficultés et leurs axes de progression.
Tout ceci n’est-ce finalement pas une forme de négation de ce qu’est le cœur de leur métier, la transmission et l’évaluation ?
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