Serions-nous à nouveau en train de changer de mode dans l’Education nationale ? Après la bienveillance, tant rabâchée dans les discours, recommandations et conseils que son sens a totalement été dévoyé**, il semblerait que « l’innovation » soit devenue la nouvelle reine des communiqués et injonctions hiérarchiques.
Vous n’en avez pas encore entendu parler ? Pourtant, le 27 avril dernier, le rectorat vous a invités à une « journée académique de l’innovation » à Reims, pour « installer les Bonheurs à l’Ecole » (sic). Récemment, lors de ses réunions de rentrée avec les chefs d’établissement et les organisations syndicales, le recteur a demandé « un changement de philosophie et de méthode » donc d’innover, avec, soyons rassurés, un « droit à l’erreur ». Enfin, lors de la foire de Châlons cette année, l’académie de Reims a tenu, comme une entreprise commerciale, un stand pour, entre autres, mettre en avant des « innovations pédagogiques ».
L’innovation est donc le mot d’ordre actuel pour briller aux yeux de sa hiérarchie, alors créons, innovons, expérimentons… Tartempions ! Cette nouvelle ritournelle, que, dans les prochaines années, vous verrez à coup sûr assénée partout dans l’Education nationale, ne doit pas vous faire culpabiliser.
Rappelez-vous que vous, personnels de l’Education, êtes déjà au cœur de l’innovation, au quotidien :
– vous innovez en faisant cours par-ci par-là à des classes en attente de professeurs, faute de recrutements suffisants ; en vous demandant avec incertitude dans combien d’établissements vous serez finalement affectés à la rentrée : 1, 2, ou 3 ?
– vous créez lorsque vous faites du sur-mesure pour tous les PAP, PPRE et PPS de vos classes ;
– vous expérimentez chaque semaine pour tenter, malgré un temps pédagogique rogné par l’accumulation des réunions et autres paperasses, de faire progresser vos classes ;
– vous inventez chaque cours puisque chaque classe est différente et qu’une même classe n’est pas la même entre le lundi matin et le vendredi après-midi ;
– vous vous renouvelez régulièrement pour continuer à faire votre travail malgré la cadence et le contenu des réformes (avec une mention spéciale pour les collègues de mathématiques ou de sciences de l’ingénieur victimes expiatoires de la quantième réforme du lycée).
Le SNALC vous invite donc à ne pas culpabiliser si vous n’êtes pas l’auteur de 15 projets « innovants » par an ou si, plus simplement, vous appliquez des méthodes de travail depuis plusieurs années parce qu’elles marchent !
Le SNALC vous rappelle que vous possédez ce que l’on appelle la liberté pédagogique qui vous laisse le choix de votre méthode et de votre philosophie.
Pour le SNALC, vous avez – nous avons – le plus beau projet : faire réussir nos élèves, leur transmettre le savoir et en faire des citoyens capables de comprendre le monde dans lequel ils vivent.
Nous vous invitons donc à prendre du recul et à relativiser ce qui n’est finalement qu’une énième mode, comme il y en a depuis tant d’années dans l’Education nationale.