LES RELATIONS ENSEIGNANTS/HIERARCHIE INTERMEDIAIRE
Nous, professeurs, souffrons d’une hiérarchie parfois mauvaise : refus de prise de position, remplisseur de cases Excel, grand gourou des missions sous-payées, flic de nos pédagogies afin de nous permettre de découvrir les nouvelles lubies de manière d’enseigner – méthode déguisée pour individualiser la responsabilité du professeur- distributeur de classes et d’emploi du temps etc.
Pourtant, cette hiérarchie souffre. Autant que nous, enseignants et autres personnels de l’Education nationale. L’Inspection Générale le reconnaît dans chacun de ses rapports. Les remontées d’informations sont à chaque fois les mêmes : horaires dépassant fréquemment les 60 heures par semaines, sentiment d’impuissance, pris entre le marteau et l’enclume, solitude face aux décisions… La médiocrité n’est pas à rechercher dans la valeur intrinsèque des personnes, mais dans la philosophie qui sous-tend notre gestion. Le New Public Management, apparu dès 1991 dans le monde anglo-saxon, partait d’un bon sentiment : rendre plus efficace le service public. M. Lécuyer, le chef de service au ministère de l’Enregistrement dans le célèbre Passe-Muraille, en est le plus parfait contre-exemple.
Rapidement mis en œuvre dans la Loi Organique de Finance de 2001 et les RGPP afférentes, Ken Loach en montre toute l’horreur dans son film I, Daniel Blake, représentation brutale de la déshumanisation extrême que cela produit. L’efficacité du privé au service de l’action de l’Etat… vaste programme.
Nos chefs intermédiaires sont devenus des sbires de la remontée d’indicateurs, informations brutes signifiant seulement ce que l’on veut bien leur donner comme sens, récompensés en fonction de ces mêmes chiffres. Dispensateurs de conseils surmenés, saupoudrant leurs actions comme ils peuvent par mails interposés.
Un chef expérimenté, Louis Saillans, interrogé dans une longue interview sur son nouveau livre Chef de Guerre (Mareuil Editions, 2021) déclarait abruptement : « Pour décider intelligemment il faut regarder la réalité en face. Pour cela il faut la nommer, s’y confronter, voir le terrain ». Laissons donc à nos chefs le temps d’aller voir leurs enseignants et en même temps, laissons les enseignants être force de propositions ou d’actions réelles au sein des établissements et des écoles (et écoutons-les). N’y sont-ils pas présents par vocation et passion, du moins au départ, pour la majorité d’entre eux ? Le Conseil d’Administration est trop souvent devenu une chambre de doléances et d’enregistrement. La bonne pratique vient de la pratique du terrain, pas de chercheurs bien intentionnés au langage obscur. Pratiquons le retour d’expérience de manière systémique, non obligatoire. Osons nommer les maux.
Le SNALC plaide CONTRE le nouveau management public et POUR l’instauration de plus de temps d’écoute entre humains, source de précieuses collaborations au service des élèves.
snalcdechampagne@gmail.com